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L’activité physique est définie par l’Organisation Mondiale de la santé (OMS)1 : « comme tout mouvement corporel produit par les muscles squelettiques qui requiert une dépense d’énergie supérieure à celle du métabolisme au repos ». 

Il existe différents types d’activité physique (AP) qui peuvent s’adapter aux capacités et envies de vos patients :

AP de la vie quotidienneL’exercice physiqueActivité sportive
Déplacements actifs
Activités dans un contexte domestique 
Activités dans un contexte professionnel ou scolaire
AP planifiée, structurée, répétitive 
Objectif : améliorer sa condition physique
Adhésion à des règles communes
Objectif : performance (adhésion à des règles de jeu)

L’OMS fournit des indications et des recommandations spécifiques, adaptées à différents groupes d’âge et de population, sur la quantité d’activité physique à réaliser de façon hebdomadaire. Ces recommandations visent à encourager un mode de vie actif.  

Si l’importance de pratiquer une activité physique n’est plus à démontrer, qu’en est-il pour les personnes ayant des besoins spécifiques ?

Pour les patients atteints de maladie chronique, les recommandations disent « qu‘ils devraient consacrer au moins 150 à 300 minutes par semaine à une activité d’endurance d’intensité modérée », soit 2h30 à 5h.

La place de l’activité physique dans la SEP2

L’AP a des impacts positifs sur la plupart des signes cliniques de la SEP, sur la condition physique de ces patients et leur bien-être mental. L’AP est donc une stratégie intéressante pour limiter les conséquences de la maladie.3

Une revue Cochrane a été réalisée en 2015 afin d’évaluer l’impact de l’AP dans la SEP.4 Celle-ci a mis en évidence les effets bénéfiques avec un niveau de preuve élevée. 

L’activité physique contribuerait à améliorer de nombreuses fonctions des patients atteints de SEP tel que les fonctions vésicales et intestinale.5

  • Densité osseuse
  • Cardiovasculaire
  • Fonction cognitive
  • Niveaux d’énergie
  • Flexibilité
  • Humeur
  • Force

Une étude récente, datée de 20236, a mis en avant que l’activité physique était sans danger pour les patients atteints de la SEP. D’autres études ont mis en avant que l’activité physique améliorait l’état de santé du patient.7 Elle réduit le sentiment d’isolement et favorise une sensation d’activité accrue. En outre, des exercices adaptés peuvent également aider à la gestion du stress et à l’amélioration de l’humeur contribuant à combattre les idées dépressives.

L’exercice physique n’a pas toujours été reconnu comme bénéfique, il était même déconseillé aux patients de réaliser une AP auparavant, de nombreux symptômes de la SEP pouvant paraître contradictoires avec sa pratique (fatigue, progression du handicap). La SEP est une pathologie chronique, entraînant ainsi les patients à se montrer réticents à l’idée de pratiquer ou continuer une activité physique. 

Il est donc essentiel de réaliser un suivi et de guider le patient afin de le prendre en charge de la meilleure manière possible. 

Quelles sont les directives à suivre pour prescrire de l’activité physique adaptée ?

L’ACSM (American College of Sports Medecine) fournit des directives concernant la prescription médicale similaire à celle d’une prescription classique en effet, l’ordonnance se doit de contenir8

La consultation d’AP 

Les patients atteints de SEP souffrent de nombreux symptômes9, certains de ces symptômes peuvent être atténués ou diminués grâce à la pratique d’AP tels que : 

  • La fatigue, l’altération de la condition physique, les troubles de l'équilibre
  • Le risque cardiovasculaire augmenté 
  • La sédentarité...

Cette consultation est importante pour évaluer la condition physique et la sédentarité du patient, son handicap (EDSS) et son niveau de risque cardiovasculaire (ne pas hésiter à l’orienter vers un cardiologue). 
Il est primordial de l’informer des bénéfices attendus de l’activité physique et de le rassurer sur son importance.3

Comme tout traitement, il existe des contre-indications et des points de vigilances tels que2 :

  • L’AP est contre-indiquée en cas de poussée de SEP à la phase aiguë. 
  • Les AP en milieu aquatique nécessitent des précautions particulières en cas de troubles vésico-sphinctériens non stabilisés. 
  • Les AP d’intensité élevée en ambiance chaude sont à éviter. Elles peuvent contribuer à augmenter la chaleur corporelle et l’intensité des symptômes.

Tableau 1. Classification des patients en 3 niveaux de Risques cardio-vasculaires avant prescription d’une AP*10

Niveau de risque cardio-vasculaire

Elevé et très élevéMaladie CV documentée : 
  • maladies cardiaques, maladies vasculaires périphériques et maladies cérébro-vasculaires
Diabètes de type 1 ou 2
  • (à l’exception des individus jeunes avec un diabète de type 1 et sans autres facteurs majeurs de risque CV qui peuvent être considérés comme à risque modéré ou faible)
Insuffisance rénale chronique : 
  • modérée (DFG : 30-59 mL/min/1,73 m2
  • à sévère (DFG < 30 mL/min/1,73 m2)
Un facteur majeur de risque CV nettement augmenté, en particulier :
  • une hypercholestérolémie totale > 3,1 g/L (8 mmol/L)
  • ou une hypertension artérielle ≥ 180/110 mmHg
SCORE2 ou SCORE2-op élevé
ModéréSCORE2 ou SCORE2-op modéré
FaibleSCORE2 ou SCORE2-op faible

Les niveaux d’interventions de l’activité physique ?

La prescription médicale d’AP se base sur les 4 niveaux d’intervention par l’AP du guide HAS2  (classification d’après le programme Suède en mouvement) :

NiveauPatientType d’intervention
1Patients présentant : 
  • Une maladie/blessure avérée et/ou 
  • Un état fonctionnel évalué par le médecin comme justifiant d’un programme de rééducation/réadaptation
Le patient est adressé sur ordonnance pour une rééducation/réadaptation à un professionnel de santé de rééducation.
2Patients présentant :
  • Une maladie et/ou un état fonctionnel évalués par le médecin comme justifiant d’un programme d’activité physique adaptée (APA).
Le patient est adressé sur ordonnance pour un programme d’APA à un professionnel de l’APA (professionnel de santé paramédical ou enseignant en APA-S).
3 et 4Patients physiquement inactifs qui ont besoin d’augmenter leur niveau d’AP et qui sont considérés par le médecin comme capables de participer à une gamme ordinaire d’AP ou sportive
  • Soit avec une supervision pour le niveau 3
  • Soit évalués comme capables de contrôler et de maintenir seuls leur propre AP pour le niveau 4.

Tableau 2. Recommandations d'activités physiques adaptées d'endurance et de renforcement musculaire pour les patients atteints de SEP (adapté de Latimer Cheung et al. 2013)11

RECOMMANDATIONS
Activités Physiques et Sclérose en plaques (EDSS < 6)
 Exercices aérobiesRenforcement musculaire
Quand ?2 fois/semaine2 fois/semaine
 Exercices aérobies et renforcement musculaire peuvent être réalisées le même jour
Repos d’une journée au moins pour les exercices de renforcement musculaires
Combien ?Augmentation progressive, au moins 30 min par session1set = 10 à 15 répétitions
Augmenter progressivement à 2 sets de 10 à 15 répétitions 
Intensité ?Modérée
Possibilité de parler pendant l’activité
Poids de corps, lestes, poids, bandes élastiques
A adapter pour être capable de réaliser 10 à 15 répétitions 
  • Repos de 1 à 2 min entre chaque exercice
Comment ? Mb supérieur : cycloergomètre à bras
Mb inférieur : marche, cycloergomètre
Mb supérieur et Mb inférieur : vélo elliptique
Appareils de musculation 
Poids 
Bandes élastiques 
Pouliethérapie
Poids de corps

Les objectifs de prise en charge sont liés au score EDSS du patient, ce score est aussi utilisé afin de déterminer le niveau d’intervention vers lequel il faut orienter le patient. La HAS a classé les différents types d’interventions comme ci-dessous2 :

Patients atteints de SEP avec un score EDSS de 0 à 3

Caractéristiques
  • Ces patients ont des signes minimes d’un des paramètres fonctionnels jusqu’à un handicap mais sont capables de déambuler sur 500 m sans aide et sans repos et de tenir 12 heures en activité sans aucune aide humaine ou technique.
  • L’AP permet notamment de limiter les conséquences de la fatigue.
Types d’AP
  • AP et sportives de loisirs supervisées
    • Par un éducateur sportif formé (niveau 3) ou,
    • réalisées en autonomie (niveau 4) sans précaution particulière ou avec des précautions limitées (sport-santé). 
  • Toutes les activités sont bénéfiques. 
  • Exemple : Pilates, marche nordique, yoga, tai-chi, kickboxing, escalade, équitation et aquagym. 
Recommandations
  • La réalisation d’exercices en environnement frais permet de limiter l’augmentation de la température corporelle et assure ainsi une meilleure thermorégulation limitant la fatigue liée à la SEP. 
  • Eviter les AP en environnement chaud (et humide) qui exposent à un risque d’aggravation transitoire des signes cliniques de la SEP (phénomène de Uhthoff).

Patients atteints de SEP avec un score EDSS de 3,5 à 6

Caractéristiques
  • Ces patients ont un périmètre de marche plus faible (300 m) avec une limitation dans une activité complète qui réclame une assistance minimale jusqu’à nécessiter une aide unilatérale à la marche (canne, canne anglaise, béquille), constante ou intermittente, pour parcourir environ 100 m avec ou sans repos intermédiaire. 
  • L’objectif pour ces patients est le maintien de l’autonomie par des entretiens et par une restauration des capacités physiques.
Types d’AP
  • Ils relèvent de programmes d’APA (niveau 2) supervisés par un professionnel de l’APA (kinésithérapeute ou enseignant en APA-S). 
Recommandations
  • Les exercices d’endurance peuvent être réalisés sur cycloergomètres, ergomètres à bras, tapis de marche, aquagym... et sont combinés à des exercices de renforcement musculaire et à des exercices d’équilibre. 
  • La marche peut être pratiquée de façon autonome à l’intérieur ou en extérieur, avec ou sans aide technique ou sur tapis de marche avec possibilité d’adaptation.

Patients atteints de SEP avec un score EDSS de 6,5 ou plus

Caractéristiques
  • Ces patients ont un handicap sévère avec :
    • À 6,5, une aide permanente bilatérale (canne, canne anglaise, béquille) nécessaire pour marcher 20 m sans s’arrêter,
    • À 7, essentiellement un confinement en fauteuil roulant,
    • À 8, essentiellement un confinement au lit et au fauteuil et
    • À 9, un état grabataire.
Types d’AP
  • Orientation vers la réadaptation et exclusion d’une AP classique. 
    • Objectifs de l’ordre du confort et du fonctionnel.
Recommandations
  • Ces patients relèvent d’une rééducation/réadaptation (niveau 1) en SMR (soins médicaux et de réadaptation) et/ou en kinésithérapie en ville. 
  • Un programme d’APA (niveau 2) peut être associé au début dans le SMR en complément de la rééducation.

Il est essentiel d’adopter une approche de médecine personnalisée en tenant compte du profil de chaque patient, en prenant en considération leurs ressentis individuels, et leurs symptômes. 
La mise en place d’un programme progressif permettra aux patients de s’acclimater progressivement à l’activité physique et de se sentir rassuré. 

L’éducation du patient : rôle essentiel dans la mise en place d’une activité physique adaptée

Pour éduquer au mieux le patient, l’accompagnement doit être précis et adapté à chacun, en prenant en compte chacun des symptômes tel que le phénomène d’Uthoff de la sclérose en plaques.  Les patients doivent être conscients que ce phénomène n’est pas une poussée, que celui-ci est transitoire, et sa fréquence peut être augmentée avec la pratique d’une activité physique adaptée. Il est important de rappeler les conditions favorables à un exercice physique pour l’éviter : favoriser l’activité physique en début de journée ou fin de journée c’est à dire lorsque les températures extérieures sont plus basses. 

L’activité physique est à adopter dans les habitudes de chacun, le prescripteur joue un rôle central/crucial, il se doit de présenter l’APA à la même échelle que le traitement de fond médicamenteux afin que le patient comprenne l’importance et l’influence d’être régulier. L’objectif est de l’intégrer au quotidien du patient, en lui mettant en avant l’ensemble des bien faits.


Qui peut prescrire ?

La prescription de l’APA se fait exclusivement par des médecins. Malgré tout il s’agit d’un travail pluridisciplinaire puisque le médecin prescripteur va mettre en relation le patient avec des professionnels ayant les spécifications nécessaires dispensées pour l’APA . 
« Le renouvellement ou l'adaptation de la prescription initiale d’APA peut être effectué par le masseur-kinésithérapeute, sauf avis contraire du médecin prescripteur ». Cela reste donc un travail pluridisciplinaire afin d’avoir le meilleur suivi possible pour le patient.29

Existe-t il un remboursement ?

Malheureusement l’APA n’est pas remboursée par l’assurance maladie ce qui constitue aussi un frein dans la prise en charge. Certaines agences régionales de santé, collectivités locales ou organismes complémentaires peuvent offrir des financements dans le but de réduire le reste à charge des assurés.29


En résumé : 

ll est encourageant de constater que les recommandations médicales évoluent pour le bien-être des patients atteints de la sclérose en plaques (SEP). Auparavant, les médecins conseillaient aux patients nouvellement diagnostiqués d’éviter tout exercice physique, mais aujourd’hui, nous savons que l’activité physique adaptée peut avoir un impact positif réel et améliorer la qualité de vie des patients. L’APA est essentielle pour maintenir la mobilité, la force musculaire et la santé générale des patients atteints de SEP.

L’adoption de l’APA dépend en grande partie de la manière dont elle est présentée par les médecins et les professionnels de santé. Les patients doivent être informés des avantages spécifiques de l’exercice pour la SEP et encouragés à l’intégrer dans leur routine quotidienne. La communication ouverte et la sensibilisation sont essentielles pour encourager les patients à adopter un mode de vie actif. 
Il est prometteur de voir que la prise en charge de la SEP évolue vers une approche plus holistique, incluant l’activité physique comme un élément clé pour améliorer la qualité de vie des patients. 

Il est vrai que malgré les avantages de l’activité physique adaptée (APA) pour les patients atteints de la sclérose en plaques (SEP), certaines réticences persistent. Il convient de prendre en considération : les symptômes de patients qui paraissent parfois insurmontables (prise en charge individualisée), le financement qui peut s’avérer être un obstacle, la mise en place progressive de l’APA. 

Références
  1. Activité physique (who.int). Site consulté le 26/08/2024

  2. fiche_aps_sclerose_en_plaques.pdf (has-sante.fr)

  3. Dalgas U. Exercise therapy in multiple sclerosis and its effects on function and the brain. Neurodegenerative disease management 2017;7(6s):35-40.

  4. Heine M, van de Port I, Rietberg MB, van Wegen EE, Kwakkel G. Exercise therapy for fatigue in multiple sclerosis. Cochrane Database of Systematic Reviews 2015;2015(9):CD009956.

  5. Exercice et activité physique | Société nationale de la SP (nationalmssociety.org)

  6. Learmonth YC, P Herring M, Russell DI, Pilutti LA, Day S, Marck CH, Chan B, Metse AP, Motl RW. Safety of exercise training in multiple sclerosis: An updated systematic review and meta-analysis. Mult Scler. 2023 Nov;29(13):1604-1631.

  7. Motl, R.W., Sandroff, B.M. Benefits of Exercise Training in Multiple Sclerosis. Curr Neurol Neurosci Rep 15, 62 (2015). 

  8. Microsoft Word - Reco_generales_pratique_sportsante_2020.docx (cnosf.org)

  9. Sport | Ligue française contre la sclérose en plaques (ligue-sclerose.fr)

  10. Sclerose en plaques – Directives en matière de mouvement sur 24 heures (csepguidelines.ca)

  11. Consultation et prescription médicale d’activité physique à des fins de santé chez l’adulte (has-sante.fr)

  12. synthese_evaluation_etp_v2_2014-06-17_16-39-42_203.pdf (has-sante.fr) Consulté le 26/08/2024

  13. Prescription d’activité physique adaptée | ameli.fr | Médecin

240404141147TQ - 09/2024