- Article
- Source : Campus Sanofi
- 10 avr. 2025
Actualités dans les maladies pulmonaires rares : les innovations thérapeutiques dans l’ASMD

Intervenant :
Pr Martine REYNAUD-GAUBERT – Pneumologue, CHU Marseille
Modérateurs :
Pr Bruno CRESTANI – Pneumologue, Hôpital Bichat, AP-HP Paris
Pr Ludivine WEMEAU – Pneumologue, CHU de Lille
Au sommaire :
00:00 |
Introduction |
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00:31 |
Deux cas cliniques d’ASMD |
03:27 |
Première partie : Qu’est-ce que l’ASMD ? |
09:00 |
Deuxième partie : Études sur des cohortes françaises |
10:59 |
Conclusion |
Et surtout, pour les pneumologues que nous sommes, pensez à une ASMD quand on a une PID, surtout si elle est particulièrement atypique et si on a aussi une splénomégalie, une hépatomégalie, une thrombopénie ou des troubles lipidiques.
Pneumologue
Pr. Martine REYNAUD-GAUBERT - Innovation thérapeutique : actualités dans le Déficit en Sphingomyélinase Acide (ASMD)
« Merci beaucoup pour cette introduction. Je remercie le laboratoire Sanofi de me donner l'opportunité de partager avec vous des innovations donc non plus diagnostiques mais thérapeutiques. En particulier nous allons aborder le déficit en sphingomyélinase acide (ASMD), que vous verrez régulièrement dans cette présentation, dit également maladie de Niemann Pick. On verra type A ou type B. Mes liens d'intérêt.
Je commencerai en préambule par deux observations que nous avions déjà publiées il y a quelques temps et qui nous avaient interpellés. Du moins, qui devaient faire interpeller le pneumologue, puisqu'il s'agit de deux patients qui étaient référés dans le service de pneumologie.
Le premier est un patient de 50 ans qui était donc adressé pour une dyspnée mMRC 2, mais progressivement croissante avec le temps, qui était restrictive, qui avait des anomalies de la lignée interstitielle en TDM, comme on le verra tout à l'heure, avec une hépatospénomégalie, une thrombopénie. Donc il y avait un diagnostic qui était apposé et le patient avait été vu en collaboration avec des hématologues et des hépatologues. Qui effectivement sur le myélogramme, la BOM et la PBH, retrouvaient des macrophages spumeux, vacuolés, remplis donc de lipides. Dans ce contexte, une activité enzymatique en sphingomyélinase acide avait été réalisée et était abaissée. L'analyse génétique du gène SMPD1 retrouvait une mutation à l'état homozygote et le diagnostic de maladie de Niemann-Pick type B ou ASMD était posé. Ce patient est perdu de vue pendant quelques années. Il revient 5 ans plus tard avec une dyspnée qui s'est très nettement majorée, une restriction qui s'est également majorée, une oxygénorequérance. Et donc vous voyez très bien l'imagerie TDM qui montre aussi une majoration des lésions, en particulier du verre dépoli, un « crazy-paving », des lésions d'emphysème. Et donc, compte-tenu du jeune âge du patient, de l'absence de contre-indication significative d'organes vitaux, le patient est inscrit sur liste d'attente en vue d'une transplantation pulmonaire. On y reviendra un peu plus tard.
Le deuxième patient est totalement différent puisque c'est un patient pour lequel le diagnostic était déjà posé. Le diagnostic avait été posé alors qu'il était enfant, à l'âge de 3 ans, sur une hépatosplénomégalie, des thrombopénies et des épistaxis. C'est un patient non-fumeur qui n’avait pas de symptomatologie respiratoire franche en dehors d’hémoptysies récidivantes, raison pour laquelle il était admis en pneumologie. Qui étaient en fait relativement fréquentes et peu importantes, mais qui était assez récentes, alors qu'il avait déjà eu des épistaxis par le passé et qu'il en avait encore. Et bien entendu une hépatosplénomégalie douloureuse, des plaquettes qui étaient basses, des triglycérides élevés et des HDL cholestérol bas. Ce patient a donc eu un bilan, comme tout patient qui a des hémoptysies, une fibroscopie bronchique avec LBA. Il a été mis en évidence des sidérophages, donc témoins d'une hémorragie intra-alvéolaire franche avec, par contre, un LBA qui était entièrement négatif, donc une microbiologie négative qui ne permettait pas de trouver un facteur de risque autre que simplement le fait que ce soit une maladie de Niemann-Pick.
Donc mon exposé va se faire en deux parties. Une première partie concernant l’ASMD, qu'est-ce que l’ASMD ? Parce qu’on est, pneumologue, pas très habitué à voir ce type de patients et surtout à faire le diagnostic. Et ensuite en deuxième partie, la thérapeutique qu'on peut proposer actuellement.
Donc la maladie de Niemann-Pick, A ou B, c'est une maladie de surcharge dite « lysosomale » puisqu'elle intéresse les lysosomes. Ce sont des lysosomes qui normalement sont, comme vous le voyez dans la diapositive ici, normaux. Donc les organes intracellulaires qui servent à participer à l'homéostasie de la cellule et pour lesquels, ici dans la maladie de Niemann-Pick, on voit qu'il y a de la surcharge lipidique et donc c'est un déficit en activité sphingomyélinase acide qui est impacté. C'est une transmission génétique autosomique récessive avec des mutations qui sont mises en évidence sur le gène SMPD1, qui code pour l'enzyme sphingomyélinase acide, qui est responsable du métabolisme de la sphingomyéline. On va donc avoir une surcharge en sphingomyéline et donc une perturbation de l'homéostasie cellulaire. Ces cellules donc, ce sont essentiellement les monocytes et les mastocytes, macrophages qui vont être impliqués. Mais il y en a partout dans l'organisme et donc c'est essentiellement une maladie qui va toucher le foie, la rate, les poumons et dans les cas les plus sévères le système nerveux central. Mais on verra finalement très peu.
Plusieurs phénotypes de maladie. Donc quand on dit « type A », « type B », finalement ce sont tout simplement des extrêmes de la maladie, mais finalement avec un continuum qui est la « forme A/B ». Et donc le type A est finalement des patients que l'on ne voit pas, nous, pneumologues adultes ou même pédiatres, puisque ce sont des patients pour lesquels le diagnostic est porté en général devant des atteintes neurodégénératives et donc neurologiques au premier plan, chez des patients, donc qui sont à la naissance et qui meurent généralement dans les 3 premières années de vie. Le type B c'est celle qui est un peu intermédiaire entre les deux, c'est-à-dire que le déficit en sphingomyélinase acide est moins important disons, avec là aussi, une atteinte multi-organes mais une atteinte neurologique lente et progressive et donc souvent des décès dans l'enfance ou du moins chez des adultes jeunes. Et enfin le dernier type qui est celui qui nous concerne le plus, ce sont des atteintes multi-organes chroniques dans lequel il n’y a pratiquement pas ou peu d'atteintes neurologiques, ou du moins vraiment très mineures, mais qui par contre va concerner plusieurs organes dont le poumon, qui peut se voir à l'âge pédiatrique mais également à l'âge adulte avec des décès à l'âge adulte.
Donc maladie multi-systémique. Pourquoi ? Parce qu'en fait, dans 90% des cas, on va retrouver une splénomégalie, dans 70% des cas, une hépatomégalie, donc une organomégalie qui est effectivement prédominante mais pas que, puisqu’effectivement l'atteinte pulmonaire interstitielle est présente dans plus de 80% des cas, ainsi que les symptômes musculosquelettiques.
Enfin, sur le plan biologique, biochimique, on a systématiquement une thrombocytémie avec des plaquettes qui sont souvent inférieures à 100 000 plaquettes et une dyslipidémie avec, en particulier, des triglycérides élevés et des HDL cholestérol bas.
Un rapide focus sur l'atteinte viscérale donc on l'a vu, là ils sont sur une IRM, une hépatosplénomégalie majeure avec, comme symptôme inaugural, de la splénomégalie, des douleurs spléniques, mais également des signes d'hypersplénisme secondaire, voire de rupture hémorragique. Des atteintes hépatiques également, qui peuvent se traduire par une insuffisance hépatocellulaire ou une cirrhose.
L'atteinte pulmonaire, c'est en général une atteinte interstitielle qui est finalement assez peu spécifique, avec toux et dyspnée d'effort comme on le voit régulièrement chez nos patients. Mais surtout ce qui est peut-être un élément intéressant, ce sont des infections pulmonaires à répétition qui sont parfois assez atypiques chez ces patients qui ne sont pas sécrétants, avec un trouble diffusionnel, un trouble de restriction et un verre dépoli qui fait que souvent ce sont des PID dites « inclassables » : avec du verre dépoli, avec quand même une prédominance apico-basale souvent, mais pas toujours, un « crazy paving » qui peut se voir aussi, mais parfois des PID dites « inclassables ». Et il ne faut pas s'arrêter devant ce diagnostic, d'autant qu'il y a une faible corrélation entre la clinique et la tomodensitométrie.
Deux autres paramètres, c'est le côté biologique, donc un profil athérogène avec un HDL bas et des triglycérides élevés, donc un risque de coronaropathie ou de vasculopathie, l'atteinte hématologique du fait de la thrombopénie. Et donc des risques hémorragiques, en particulier ecchymose, épistaxis et donc hémoptysie, comme on l'a vu chez notre patient, qui sont exceptionnels. L'os est impacté aussi bien chez l'enfant, avec des retards de croissance, que chez l'adulte, de type ostéopénie/ostéoporose.
Le diagnostic est finalement très simple, le tout c'est d'y penser, puisque c'est le dosage de l'activité en sphingomyélinase acide qui va donc se faire de façon tout à fait simple, sur un prélèvement sanguin. Et lorsqu'on a donc une activité qui est effondrée ou basse, du moins, l'intérêt c'est de faire une analyse génétique et qui va donc confirmer le diagnostic par l'implication du gène SMPD1.
Diverses cohortes ont été exprimées, ont été donc validées. Et en particulier, une des premières cohortes qui a été validée par l'équipe d'Olivier Lidove, qui est le centre de référence en France, qui était une cohorte qui est déjà ancienne de 28 patients, mais qui montre bien effectivement toutes les anomalies chez ces 28 patients dont on a déjà parlé et qui sont vraiment particulièrement importantes tant sur le plan clinique que sur le plan biologique.
L’ASMD est une maladie qui peut causer donc des décès, c’est une maladie grave. Des études, qui sont déjà un peu anciennes, sur 103 patients présentant une forme Niemann-Pick B : 61 enfants, 42 adultes. On voit que les causes de mortalité principales sont les infections pulmonaires et les pneumonies, l'insuffisance hépatique, mais également les complications après transplantation de cellules souches hématopoïétiques.
Dans une autre série, un peu plus récente, de 85 patients décédés, là aussi, comme tout à l'heure, on voit que les principales causes de décès sont l'insuffisance respiratoire, l'insuffisance hépatique et les complications hémorragiques. Et enfin, encore plus récente, donc plus récemment publiée, toujours par l'équipe d'études multicentriques françaises, coordonnée par le centre de référence, qui montre que là aussi, les causes de décès surviennent très tôt bien sûr dans le type A, beaucoup plus tard dans le type A/B, et autour de 58 ans pour les Niemann-Pick de type B. Donc c'est quelque chose qui, effectivement, on comprend bien que dans le type A, ce sont les troubles neurologiques qui prédominent et dans les types B, ce sont les cancers et les autres complications éventuellement dont la greffe hépatique.
Donc en conclusion, la maladie Niemann-Pick de type B, c'est donc une maladie très rare. Je crois que c'est 1 sur 200 000 cas à la naissance. Donc une maladie lysosomale particulièrement rare, qui est autosomique récessive, avec une mutation portant sur le SMPD1, qui est multi-systémique et qui touche le foie, la rate, les poumons, l'os mais également le secteur hématologique, avec en particulier la thrombopénie et l’hypertriglycéridémie, qui touchent aussi bien les enfants et à ce moment-là, il y a souvent des enfants jeunes qui ont une atteinte neurologique, y compris quand ce sont des cas de A/B.
Et surtout donc, pour les pneumologues que nous sommes, pensez à une ASMD parce qu’on n’y pense pas souvent, et nous les premiers, quand on a une PID, surtout si elle est particulièrement atypique et surtout si on a aussi une splénomégalie, une hépatomégalie, une thrombopénie, des troubles lipidiques.
Merci pour votre attention. »
Regardez l’intervention du Pr Vincent Cottin, sur l’IA pour accélérer le diagnostic des maladies pulmonaires rares, en cliquant ici :
ASMD : Déficit en sphingomyélinase acide
CPLF : Congrès de Pneumologie de Langue Française
TDM : Tomodensitométrie
mMRC : échelle de mesure de dyspnée du modified Medical Research Council
BOM : Biopsie OstéoMédullaire
PBH : Ponction Biopsie Hépatique
SMPD1 : SphingoMyelinase PhosphoDiesterase 1
HDL : High Density Lipoprotein
LBA : Lavage Broncho-Alvéolaire
IRM : Imagerie par Résonance Magnétique
PID : Pneumopathie Interstitielle Diffuse
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