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- Source : Campus Sanofi
- 7 août 2025
Cas clinique : Découvrez le replay présenté par le Dr. Damaj - SFP 2025

Intervenant :
Dr Léna DAMAJ – CHU de Rennes
Modérateur :
Dr Marc BELLAICHE – Hôpital Robert Debré
Au sommaire :
00:00 | Introduction |
00:50 | Présentation du premier cas clinique |
02:04 | Explorations diagnostiques et hypothèses |
05:22 | Confirmation génétique et diagnostic final |
07:10 | Présentation de la maladie d'ASMD |
09:42 | Phénotypes cliniques de l'ASMD |
12:15 | Traitement et évolution du premier cas |
13:13 | Présentation du second cas clinique |
15:08 | Conclusion |
Une meilleure connaissance […] de ces maladies permet d’orienter […] plus vite le diagnostic.
Neuropédiatre - CHU de Rennes
« Merci [...]. Alors bonjour, Léna Damaj, je suis neuropédiatre au CHU de Rennes et je travaille aussi au sein d'un centre de compétences pour les maladies héréditaires du métabolisme et donc ce midi pendant ce symposium je voulais partager avec vous une histoire clinique qui date un peu mais qui du fait qu'elle date un peu reflète le long parcours diagnostique d'enfants porteurs de maladies rares et comment une meilleure connaissance de l'histoire naturelle de ces maladies permet de plus en plus actuellement d'orienter plus vite le diagnostic derrière. Alors voici mes liens d'intérêts et messages de Sanofi concernant les traitements.
Je voulais vous partager l'histoire de ce petit garçon qui est le 2e d'une fratrie de 2. Il a une sœur aînée qui est en bonne santé, la famille est d'origine caucasienne et les parents ne sont pas apparentés. C'est un petit garçon qui né au terme d'une grossesse de déroulement parfaitement normal avec des biométries dans les limites de la normale à la naissance et puis qui présente un développement psychomoteur tout à fait normal. Il y a juste des petits éléments concernant sa croissance qui est régulière mais qui est à -2 DS au niveau statural et c'est un petit garçon pour lequel on décrit un transit un peu accéléré mais sans retentissement sur la croissance pondérale. Et donc il rentre vraiment dans le suivi médical un peu plus rapproché vers l'âge de 5 ans. À cet âge là c'est un petit garçon comme vous le voyez sur sa courbe qui évolue sur les 2-DS en taille qui a un tableau de diarrhée chronique et qui a lui aussi des infections ORL répétées qui font pratiquer par le pédiatre un bilan hépatique, qui retrouve, sur le premier bilan une cytolyse à 4 fois la normale avec une fonction hépatique préservée chez un petit garçon qui présente par ailleurs une hépatosplénomégalie et pas d'autres manifestations d'atteinte hépatique, il n’a pas d'ictère, pas d'ascite. Et puis sur le plan plus global c'est un petit garçon qui est plutôt mignon, enfin qui n’a pas d'éléments morphologiques notamment comme ceux qu'on a pu voir dans la présentation précédente. Et donc sur ce bilan là à l'âge de 5 ans comme on fait souvent et bien le bilan est répété, répété et trouve la persistance de cette cytolyse hépatique qui ne passe pas, qui reste stable avec toujours l'absence d'atteinte de la fonction hépatique. Et donc on est face à un petit garçon qui présente une hépatosplénomégalie qui est homogène, plutôt non évolutive avec un tableau de de cytolyse, une diarrhée et un retard staturo-pondéral. Et donc sur ces éléments, il y a des bilans complémentaires qui vont être réalisés de manière un peu progressive et échelonnée, avec un bilan général, un peu de débrouillage avec notamment un bilan thyroïdien et puis une recherche de maladie de Wilson. Sur cette cytolyse hépatique, un bilan auto-immun avec la recherche d’auto-anticorps pouvant être responsable d'hépatite auto immune. Et puis progressivement ses examens revenant négatifs, et bien il a un bilan métabolique un petit peu orienté sur ce qu'on appelle les maladies de surcharge, c'est à dire des maladies qui se traduisent facilement cliniquement par des hépatosplénomégalies. Et donc un bilan qui un petit peu orienté à la recherche de différentes pathologies et notamment la maladie de Gaucher qui est une grande pourvoyeuse d'hépatosplénomégalie chez l'enfant, mais aussi d'autres bilans avec notamment, comme dans la présentation qu'on vient de voir l'étude des mucopolysaccharides et oligosaccharides Urinaires pour la mucopolysaccharidose de type I par exemple chez ce petit garçon qui n'a pas d'éléments morphologiques orientant. Et puis il bénéficie également d'un bilan lipidique que je vais montrer juste après, d'une échographie transthoracique qui est normale, d'un scanner thoracique qui est dit normal. Et puis un test de la sueur.
Et quand on fait pratiquer le bilan lipidique, en fait, on retrouve des anomalies avec un profil plutôt athérogène, avec une hypercholestérolémie totale et, fait plus inhabituel, des HDL qui sont vraiment bas, et ce sur plusieurs bilans consécutifs. Et donc, si on essaie de résumer un petit peu le tableau de ce petit garçon, il a donc son atteinte clinique décrite avec l'hépatosplénomégalie, la cytolyse qui est stable avec la fonction hépatique préservée. Il a un développement psychomoteur tout à fait normal. Il a un retard staturopondéral qui ne va pas en s'améliorant puisqu’initialement et sur ses courbes à -2DS et on voit que la taille se casse complètement la figure à partir de l'âge de 7-8 ans avec là une cassure staturale. Et puis il a des anomalies lipidiques. Et connaissant mal ce profil, on cherche, on cherche. Et puis il y a un avis qui est pris auprès d'un centre de référence maladies rares qui propose en hospitalisation, la réalisation d'une ponction biopsie hépatique pour essayer de comprendre le phénotype de ce petit garçon. Et le résultat n’est pas très spécifique, il montre une micro-stéatose qui touche tous les hépatocytes et avec des vacuoles lipidiques et pas d'arguments pour une cholestase. Sur ce profil là, les anatomopathologistes nous répondent « Ah, ça peut être ce qu'on appelle un déficit en lipase acide lysosomal » : une maladie qui avait déjà été recherchée dans son bilan initial avec une avec une activité enzymatique qui était décrite normale. Où ils nous disent, ça pourrait être une maladie de Niemann-Pick de type C. Avec un petit garçon, qui n'a pas du tout d'atteinte neurologique dans ce contexte. Et donc ce dossier date d’il y a quelques années et ne trouvant, pas n'arrivant pas à avancer sur le plan diagnostique, il a été validé la réalisation d'une étude en génétique.
Donc le petit garçon a 10 ans donc vous voyez qu'on a 5 ans d'évolution des symptômes et donc dans un premier temps ce qui est réalisé c'est un panel donc c'est à dire une étude des gènes vraiment ciblés, des gènes impliqués dans les maladies de surcharge. Et dans ce panel il est mis en évidence une variation au sein du gène qui s'appelle SMPD1 qui est un gène qui est impliqué dans une maladie de surcharge. Mais il y a qu'un seul variant de retrouvé dans une maladie qu'on présuppose être autosomique récessive et donc comme ce panel revient avec un seul variant il est validé la réalisation d'une étude génétique plus globale en exome qui permet de mettre en évidence un 2e variant dans ce gène SMPD1 et dont les variations sont responsables d'un déficit en sphingomyélinase acide, ASMD, historiquement plus connu sous le nom de la maladie de Niemann-Pick.
Et donc à la suite de ce résultat, on a vérifié la ségrégation familiale donc on a validé que chacun des 2 parents étaient bien porteurs d'une des 2 variations présentées par ce petit garçon. Et puis a posteriori, l'activité sphingomyélinase acide était bien abaissée et pouvant expliquer le phénotype de ce petit garçon. Par ailleurs, on a d'autres marqueurs un peu moins spécifiques aussi, qui peuvent être perturbés dans le déficit en sphingomyélinase acide et qui étaient effectivement anormaux chez ce garçon. C’était une étape très importante de pouvoir poser ce diagnostic au bout de 5 ans de parcours diagnostique.
Alors le déficit en sphingomyélinase acide, ASMD, historiquement connu sous le nom de maladie de Niemann-Pick c’est une maladie héréditaire du métabolisme qu'on catégorise dans les maladies de surcharge et en lien avec une ce qu'on appelle une pathologie lysosomale. Alors les lysosomes, vous vous connaissez : ces organelles intracellulaires qui sont ici en bleu, qui sont remplies d'enzymes et qui ont la fonction de métaboliser les molécules complexes et notamment la sphingomyéline.
Et donc en cas de déficit de la sphingomyélinase, on va avoir une accumulation de lipides complexes et donc de certaines formes de la sphingomyéline qui vont pouvoir infiltrer un peu tous les tissus du corps et donner des symptômes. Et donc comme vous le voyez sur le schéma sur la droite, c'est une atteinte qui peut être vraiment multi systémique et toucher un peu tous les organes.
Pour le petit garçon que je vous ai présenté, il présente essentiellement une atteinte viscérale avec une hépatosplénomégalie, on voit que c'est la proportion des patients porteurs de déficit en sphingomyélinase acide et présentant une hépatosplénomégalie est très importante. C'est un peu un des signes cardinaux. Et puis le petit garçon que je vous ai présenté avait aussi des troubles de la croissance avec un retard de croissance staturo-pondérale mais les patients peuvent aussi présenter des douleurs osseuses et des fragilités osseuses qui peuvent être responsables de fractures. Ce sont des patients qui peuvent aussi avoir une atteinte pulmonaire de type pneumopathie infiltrative interstitielle diffuse avec une altération des échanges gazeux qu'on peut évaluer en mesurant la DLCO qui peut être altérée dans ces situations. Ce sont des patients qui présentent aussi et surtout à l'âge adulte, des anomalies hématologiques avec une atteinte des plaquettes et des globules rouges avec des thrombopénies, des anémies et des atteintes cardiovasculaires, comme on a pu le voir avec un profil lipidique athérogène mais aussi des anomalies qui peuvent être morphologiques au niveau du cœur, avec notamment des valvulopathies ou des lésions d'athérosclérose parfois. Et puis, sur des présentations plus précoces, on peut avoir aussi une atteinte ophtalmique au fond d'œil, avec la constatation de ce qu'on appelle une macula rouge cerise chez 25% des patients et des manifestations neurologiques qui peuvent être de l'ordre du central avec des troubles neurodéveloppementaux ou des troubles périphériques avec des tableaux de neuropathie. Et donc en fait on voit que cette maladie c'est un spectre clinique qui va s'étendre de la toute petite enfance, dès la première année de vie jusqu'à l'âge adulte avec des phénotypes qui veut être très différents. Donc on distingue historiquement un type A, un type AB et un type B.
Dans le déficit en sphingomyélinase acide de type A, anciennement Niemann-Pick de type A ou la forme neuro-viscérale infantile, les symptômes commencent dès la première année de vie, vers l'âge de 2-3 mois parfois, avec des enfants qui vont présenter des difficultés alimentaires importantes et la constitution progressive d'une hépatosplénomégalie. Ils ont initialement un développement psychomoteur tout à fait normal mais qui vont vers l'âge de 6-9 mois installer une stagnation développementale, puis une régression avec une évolution extrêmement péjorative avec un décès en général vers l'âge de 2-3 ans. Ce sont ces patients qui vont présenter de manière prédominante une atteinte neurologique centrale et une atteinte ophtalmique avec la présence d'une macula rouge cerise.
À l'autre extrémité du spectre, on a la forme qui touche plutôt le grand enfant, l'adolescent ou l'adulte, la forme viscérale chronique ou le type B ce sont des patients qui vont avoir plutôt une atteinte viscérale, donc plutôt une hépatosplénomégalie, les complications hématologiques et respiratoires, mais qui, en général ne vont pas avoir de Macula rouge cerise et ne vont pas avoir de manifestation neurologique.
Et puis, à la croisée de ces 2 phénotypes, il y a le phénotype intermédiaire qui est neuro-viscérale chronique qui survient chez des enfants un tout petit peu plus grand au-delà de la première année de vie et qui vont avoir à la fois l'atteinte viscérale avec l’hépatosplénomégalie et parfois l'atteinte respiratoire, et aussi une atteinte neurologique mais qui va être moins précoce et moins sévère que les formes neuro-viscérales infantiles de type A.
Les anomalies lipidiques on les retrouve dans les 3 phénotypes, en fait les enfants, dans les formes neuro-viscérales infantiles peuvent déjà avoir des perturbations du bilan lipidique avec notamment cette hypercholestérolémie et la diminution du taux d'HDL. Et donc devant la constatation de l'association de ces symptômes, il peut être intéressant de réaliser ce bilan lipidique qui, s'il est perturbé, doit faire rechercher cette pathologie en réalisant l'étude de l'activité enzymatique de la sphingomyélinase acide qui va être diminuée et par la suite confirmer le diagnostic avec une étude en génétique moléculaire et l'étude du gène SMPD1 pour cette maladie qui est donc autosomique récessive et qui peut être en cas de diagnostic aussi importante pour le conseil génétique au sein de la famille. Alors la mise en évidence de ce diagnostic, elle est importante puisqu’en France il y a la possibilité de mettre en place un traitement par enzymothérapie substitutive, ce qui a été le cas pour ce petit garçon qui a bénéficié de ce traitement et qui a permis comme vous le voyez, une rectification de sa courbe de croissance staturale et pondérale de manière assez flagrante. Qui a permis la normalisation de son bilan hépatique et lipidique ainsi que la disparition de son hépatosplénomégalie. Qui a permis la normalisation de ces explorations fonctionnelles respiratoires puisqu'au diagnostic il avait une DLCO à 75% et qui est passée à 100% à la dernière évaluation. Et c'est un traitement qui a été bien toléré cliniquement.
Et je voulais terminer la présentation par une illustration d'un d'une autre situation clinique qui est beaucoup plus récente et qui n'a pas du tout eu la même porte d'entrée. En fait, c'est une famille originaire du Maghreb et la porte d'entrée c'est cette patiente qui arrive en consultation. C'est une famille donc originaire du Maghreb et qui a vécu en Italie donc le suivi médical a été un petit peu compliqué. Et cette maman qui a 3 enfants arrive en France et elle nous explique que sa maman à elle, lui a dit qu’elle-même avait une grosse rate. Sa maman a dit : « tes enfants aussi ils ont tous une grosse rate ».
La maman arrive en France avec ces éléments là et elle est vue par un collègue en hémato pédiatrie. Il voit les 2 enfants, celui qui est né en 2012 et celui qui est né en 2016 puisque l'ainé vit en Italie et on n'a pas pu le voir en consultation. Le collègue hémato pédiatre sur ces éléments demande une recherche de maladie de Gaucher. L’étude enzymatique pour la maladie de Gaucher est revenue négative et laboratoire de Lyon dit que ce n’est pas une maladie de gaucher, par contre ils ont dosé une autre enzyme et c'est un déficit en sphingomyélinase acide qui a été confirmé chez ses 2 enfants. Le garçon quand je l'ai vu en consultation avait une croissance staturo-pondérale normale et il avait au bilan, pareil, une hypercholestérolémie mais surtout des HDL très bas. Sa petite sœur, elle est plutôt très grande, elle a une croissance staturo-pondérale normale et elle a aussi un taux d’HDL bas et les 2 ont pour l'instant des explorations fonctionnelles respiratoires mais le garçon est en train de diminuer : ses capacités de d'échange gazeux et on le surveille de très près pour cela. Ces 2 enfants je les ai vus en constatation mais avec le diagnostic et donc il a été confirmé qu'ils sont tous les 2 porteurs à l'État homozygote de d’un variant au sein du gène SMPD1 un que la maman est elle même homozygote aussi pour ce variant et de plus le couple est par ailleurs également apparenté.
J’espère qu'avec cette présentation, je vous ai montré l'intérêt sur des situations un peu inexpliquées, notamment des hépatomégalies, des bilans simples et là en l'occurrence d'un bilan lipidique pour permettre d'orienter le diagnostic et de pouvoir proposer aux familles quand cela est possible et indiquer une thérapeutique spécifique. Je vous remercie. »
ASMD : Déficit en sphingomyélinase acide
SFP: Société Française de Pédiatrie
DS : Déviation Standard
ORL : Oto-Rhino-Laryngologie
DLCO : Diffusing Capacity of the Lung for Carbon Monoxide
HDL : High-Density Lipoprotein
SMPD1 : Sphingomyelin Phosphodiesterase 1
250723170901BW – 08/2025